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Les Brins D'Herbes [1886]

LES BRINS D' HERBES

Traduit de l'étonnant poëte américain Walt Whitman. — J. L.)

DÉDICACES

JE CHANTE LE SOI-MÊME

Je chante le soi—même, une simple personne séparée, Pourtant tout le mot démocratique, le mot En Masse. C'est de la physiologie du haut en bas, que je chante, La physiononmie seule, le cerveau seul, ce n'est pas 
  digne de la Muse; je dis que l'Être complet en 
  est bien plus digne
C'est le féminin à l'égal du mâle, que je chante. C'est la vie, incommensurable en passion, ressort, et 
  puissance,
 med.00401.002 Pleine de joie, mise en oeuvre par des lois divines pour 
  la plus libre action,
C'est l'Homme Moderne que je chante.

AUX NATIONS ÉTRANGÈRES

J'ai su que vous demandiez quelque chose pour com 
  prendre cette énigme, le Nouveau-Monde,
Et pour définir l'Amérique, sa puissante démocratie: C'est pourquoi je vous envoie mes poëmes pour que vous 
  y contempliez ce que vous désirez là.

A UN HISTORIEN

Vous qui chantez les choses d'autrefois, Vous qui avez exploré le dehors, la surface des races, 
  la vie qui se montre,
Qui avez traité de l'homme comme créature des politi- 
  ques, sociétés, législateurs et prêtres,
Moi, citoyen des Alleghenies, traitant de l'homme tel 
  qu'il est en soi, en ses propres droits,
Tâtant le pouls de la vie qui s'est rarement montrée 
  d'elle—même (le grand orgueil de l'homme en soi),
Chantre de la Personnalité, esquissant ce qui doit encore 
  être,
Je projette l'histoire de l'avenir.
 med.00401.003

A UNE CERTAINE CANTATRICE

Voici, prends ce présent, Je le réservais pour quelque héros, orateur ou général, Quelqu'un qui servirait l'excellente vieille cause, la 
  grande idée, le progrès et l'émancipation de la 
  race,
Quelque vaillant attaqueur de despotes, quelque auda- 
  cieux révolté
Mais je vois que ce que je réservais t'appartient tout 
  autant qu'à un autre.

NE FERMEZ PAS VOS PORTES

Ne fermez pas vos portes, orgueilleux librairies, Car ce qui manquait sur vos rayons bien remplis, mais 
  dont on a bien besoin,
Je l'apporte, Au sortir de la guerre, j'ai fait un livre, Les mots de mon livre, rien; son âme, tout; Un livre isolé, sans attache avec les autres, point senti 
  avec l'entendement,
Mais à chaque page vous allez tresaillir de choses qu'on 
  n'a pas dites.

POËTES A VENIR

Poëtes à venir! orateurs, chanteurs, musiciens à venir! Ce n'est pas aujourd'hui à me justifier et répondre qui 
  je suis,
 med.00401.004 Mais vous, une nouvelle génération, pure, puissante, 
  continentale, plus grande qu'on ait jamais vu,
Levez-vous! Car vous devez me justifier. Moi, je n'écris qu'un ou deux mots indicatifs pour l'a- 
  venir;
Moi, j'avance un instant et seulement pour tourner et 
  courir arrière dans les ténèbres.
Je suis un homme qui flânant le long, sans bien s'arrêter, 
  tourne par hasard un regard vers vous et puis se 
  détourne,
Vous laissant le soin de l'examiner et de le définir, Et attendant de vous le principal.

A VOUS

Etranger, si passant vous me rencontrez et désirez me 
  parler, pourquoi ne me parleriez-vous pas?
Et pourquoi ne vous parlerais-je pas?

TOI LECTEUR

Toi lecteur, palpitante vie et fierté et amour, tout comme 
  moi,
Pour toi donc les chants que voici.
(A suivre.)

Notes:

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